jeudi 15 janvier 2015

Une découverte fort à propos

Jacques Aghion

[Pan sur le bec, comme le dit très souvent le Canard Enchaîné, sauf que je n’ai pas de bec. Dans un blog du 6 novembre 2014, que j’avais malencontreusement intitulé « Trois bonnes idées qui s’avèrent mauvaises », j’avais cité un article paru dans le New York Times suggérant que c’était une mauvaise idée de planter des arbres pour sauver la planète (2). Faux dit Jacques Aghion, professeur de biochimie à l’Université de Liège (VG).] 

Toute personne sachant lire sait, actuellement, que notre
atmosphère est faite surtout d’azote, de l’oxygène et d’un fifrelin de dioxyde de carbone.
Ces mêmes personnes savent évidemment que, en partie grâce aux activités humaines, la concentration de CO2 atmosphérique augmente, causant le réchauffement de l’air dû aux rayons du soleil  (infrarouges surtout). Chacun sait également que nous avons, pauvre aérobies, besoin d’oxygène pour respirer, vivre, contrairement aux organismes dits anaérobies – surtout certaines bactéries pas toutes pathogènes.
Faut-il enfin rappeler qu’à la lumière visible du soleil, les plantes vertes et les algues absorbent du CO2 et de la vapeur d’eau (H2O) et rejettent de l’oxygène tout en synthétisant des sucres, substances à l’origine de toute la chimie biologique ? Il a été calculé que 20 à 25 pourcent de notre oxygène atmosphérique venait ainsi de la forêt amazonienne, faisant de cette forêt une richesse de l’humanité, un monument à classer parmi les monuments intouchables,  malgré la cupidité des pétroliers et des lapidaires jaloux de la richesse de son sol en petra oleum et en pierres précieuses.
Un récent article décrit des expériences faites aux états-Unis. Les résultats pourraient en permettre d’accélérer la déforestation en Amazonie comme ailleurs, ce qui souvent mènerait à la désertification – mais qu’importe le long terme aux dirigeants, aux financiers, aux pétroliers ?
Nous sommes, répétons-le, promis à un déficit d’oxygène et à un surcroît de dioxyde de carbone ; ces deux phénomènes ont des sources largement (mais pas uniquement) dues aux activités humaines. Une surabondance de CO2 contribuerait largement à un réchauffement de l’air, à un déséquilibre climatique et météorologique avec  des conséquences prévisibles sur, par exemple, la dispersion des pathologies, et l’écologie de nombreuses espèces animales comme végétales et bactériennes.
Pour remédier à cette évolution, le bon sens suggère que l’on arrête carrément de déboiser les régions forestières et que l’on ralentisse fortement le fonctionnement des machines et des industries. C’est impensable dans un monde largement mené par l’appât du gain ! Alors ?
Alors très opportunément, il vient d’être découvert – expérimentalement – qu’en présence de rayonnements ultraviolets (ceux qui nous font bronzer), le CO2 de la haute atmosphère se décompose. Cela, on le savait, on savait que se produisait ainsi un mélange assez explosif de CO (monoxyde de carbone) et O (oxygène atomique). Cet oxygène « simple » si l’on peut dire, n’existe pas à l’état libre, il se combine instantanément, soit avec un autre atome d’oxygène ce qui donne O2 que nous respirons, soit avec d’autres substances.
Mais ce qui vient d’être décrit c’est une décomposition de CO2 en carbone C et cet oxygène moléculaire, double en quelque sorte. N’est-ce pas merveilleux – devrions-nous dire « magique » ? – de pouvoir trouver ainsi que grâce au soleil, CO2 est détruit et O2 récupéré? On peut imaginer l’impact de cette découverte sur l’avenir des recherches de minéraux et de pétrole dans le sous-sol d’Amazonie, surtout si on rapproche cela de l’article de Nadine Unger (2) commenté dans un « blog » récent : serions-nous soumis à je ne sais quel groupe de pression (suivez mon regard) ? Cette opinion, « subversive » semble d’ailleurs partagée par deux universitaires australiens (3).

(1) Z. Lu et al. (2014), Evidence for direct molecular oxygen production in CO2 photodissociation, Science, 346, 61-64.
(2) N. Unger (2014), To save the planet don’t plant trees, The New York Times, 19 septembre 2014.

(3) R. Buckley & F. de Vasconcellos Pegas (2014), Conserving Brazil’s Atlantic forest, Science, 346, 1193.

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