jeudi 26 février 2015

Il faut être stupide pour payer des impôts

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Pierre Pestieau

Les Anglais ont de tous temps appelé leurs droits de
La vie ou l'évasion fiscale
succession un impôt pour les stupides, l’idée étant qu’avec une bonne ingénierie fiscale et une masse critique de patrimoine on pouvait y échapper totalement Il conviendrait de s’interroger sur les sens ambigus du mot ‘stupide’ : ignorant, honnête, naïf. En l’occurrence, on pourrait choisir de passer pour stupide. C’est comme dans le fameux Diner des cons, à la fin duquel on préfèrerait être rangé parmi les cons. Pour revenir à notre sujet, au Royaume Uni comme dans les pays où ils continuent à exister, les droits de succession sont devenus un impôt pour les classes moyennes. Les pauvres sont par définition en dessous de la base imposable et les riches s’arrangent pour ne pas les payer. Aujourd’hui la plupart des citoyens ont la nette impression que la stupidité est contagieuse en s’étendant à toutes les autres formes d’impôts.

mercredi 25 février 2015

Mons 2015 : Un euro investi, six de retrouvés et les consultants au trou

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Victor Ginsburgh


Une version plus courte de cet article a paru dans La Libre du 6 février 2015 sous le titre « Mons 2015 : Un euro perdu, six de retrouvés, vraiment ? » La version publiée ici contient des notes de bas de page (en particulier la note (5)) qui explicite le raisonnement complètement biaisé d’un consultant, qui a pourtant pignon sur rue dans le monde de la culture et autres.

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Attention à l'effet multiplicateur

Nous voilà repartis sur de bien mauvaises bases financières avec Mons, capitale européenne de la culture. Pas parce que l’événement n’est pas une bonne idée, Mons prendra sûrement une nouvelle physionomie et gagnera en réputation — on ne peut que s’en réjouir — mais il ne faut pas faire croire aux bonnes et naïves gens et à ceux qui ont donné les moyens financiers que les recettes seront cinq à six fois supérieures aux 70,5 millions de dépenses que l’aventure aura coûté — et dont 87% proviennent de subventions publiques locales et régionales (1). C’est ce qu’on appelle le « multiplicateur culturel » dans le milieu : vous payez un et récupérez six.

Il y a deux raisons pour lesquelles ce chiffre (six pour un) est contestable. La première est que le financement provient des impôts, donc de nos salaires et profits qui sont de la valeur ajoutée, alors que les dépenses des visiteurs sont basées sur les prix de vente. La valeur de vente d’un coca-cola consommée à Mons contient seulement une petite partie de valeur ajoutée pour Mons (le profit du cafetier). On ne peut donc pas comparer la valeur du financement de l’événement avec le chiffre d’affaires réalisé à Mons. La deuxième raison est qu’une bonne partie des visiteurs sera constituée de Montois, de Wallons, de Bruxellois et de Flamands. Les dépenses que ces visiteurs font auraient  probablement été faites de toute manière en Belgique. Donc ce qui est gagné par Mons est perdu pour les autres régions. Bien sûr, il y aura quelques étrangers, de Lille par exemple et là c’est au désavantage de la France. Ils ne doivent pas se plaindre puisqu’ils ont eu Lille et les visiteurs belges. Gergaud et Ginsburgh (2) ont étudié ces derniers aspects pour une douzaine de festivals d’opéra en Europe. La plupart n’ont pratiquement que des visiteurs locaux. Le seul qui y échappe et attire des étrangers au pays (ici l’Allemagne) est le festival Wagner à Bayreuth.

jeudi 12 février 2015

Mieux vaut laisser mourir les Grecs que les banques

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Victor Ginsburgh

Le titre d’un article mis en ligne vendredi serait à mourir de rire s’il n’était pas tragique : « La zone euro brise le cercle vicieux » (1). Et de continuer par des discours auto congratulatoires de la BCE et de la Commission européenne : « La relance des investissements et la chute du pétrole [sic] devraient donner un coup de fouet à la croissance… La Commission européenne se joint à son tour à l’élan d’optimisme entourant la croissance sur le vieux continent. Tous les pays de l’UE devraient sortir de récession cette année [et] la Grèce croîtra quasiment deux fois plus vite que la moyenne européenne ».

Ca va lui donner des ailes à la Grèce de croître de 2,6% en 2015, après une chute de quelque 25% de son PIB en trois ans, chute épaulée par un taux de chômage de 25% (50% parmi les jeunes) et des soins médicaux qui font que lorsque les patients arrivent à l’hôpital, ils doivent louer leur propre infirmière (qui est en général une fausse infirmière, sans le diplôme requis) pour recevoir les soins de base que le système médical en faillite ne peut plus assurer. Même les chaises qui permettent aux visiteurs de s’asseoir auprès de leurs proches dans les chambres d’hôpital doivent être louées (2).

mercredi 11 février 2015

Charité bien ordonnée

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Pierre Pestieau

Il y a peu, le Figaro (1) s’est fait l’écho d’une déclaration de Bill Gates selon laquelle il ne désirait pas payer davantage d’impôts. Le quotidien présente deux chiffres : plus de 6 milliards de dollars représentent les impôts dont Bill Gates se serait acquitté jusqu’à ce jour et 28 milliards de dollars auraient été distribués à des œuvres charitables, principalement à la  Bill & Melinda Gates Foundation. Le fondateur de Microsoft a toujours dit s'acquitter « volontiers » de ses contributions au budget public. Pour autant, le milliardaire ne tient pas à payer plus comme l’adjurait Thomas Piketty : « Son point de vue est compréhensible », a reconnu Piketty. « Je pense qu'il s'estime sincèrement mieux placé que le gouvernement pour allouer ses fonds… et par moments cela se vérifie sans doute ».
Car non content d'être le plus gros contribuable au monde, Gates est aussi l'homme le plus généreux, ayant distribué près de 30 milliards de dollars. Or ses priorités sont bien différentes de celles de l'État fédéral américain, dont les dépenses militaires avalent une importante fraction du budget. A contrario, la Bill & Melinda Gates Foundation n'alloue pas d'argent à la défense : elle se consacre à l'éducation et à la santé. Ainsi donc Bill Gates se substitue largement au gouvernement lorsqu'il s'agit d'atteindre des objectifs précis, comme celui de lutter contre la maladie et la pauvreté en Afrique.

jeudi 5 février 2015

On trouve toujours plus métèque que soi

2 commentaires:

Pierre Pestieau

Au moment où, suite au retrait annoncé d’Arcelor-Mittal de Liège, la page sidérurgique se tourne lentement en Wallonie, me revient un souvenir récent. Il y a quelques années, je me trouvais à l’Université d’Uppsala et faisais la connaissance de l’attaché culturel auprès de l’Ambassade de Belgique en Suède. Il m’apprit ce que tout Liégeois devrait connaître, à savoir qu’au début du 17ème siècle, environ 5.000 Wallons, pour la plupart originaires de la Cité ardente, ont émigré dans le centre et l'est de la Suède pour y développer la sidérurgie locale. Leur rôle bien que déterminant selon de nombreux historiens fut un moment oublié. Et cette évolution est à méditer.

Les Charlie sont morts plusieurs fois pour rien

1 commentaire:
Victor Ginsburgh

« Tuer un homme, ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme » (Antoine Compagnon, Le Monde, 16 janvier 2015).

L’immédiateté n’est pas toujours bonne conseillère. Quelques semaines à peine après Charlie, et le soufflé des quatre millions s’essouffle. Les quelques jours qui ont suivi les assassinats ont déjà montré que les Charlie sont morts plusieurs fois pour rien, parce que leur mort a été volée. Mais ils continuent de rire où ils se trouvent

La première fois, quand certains qui se croient démocrates défilent parmi les quatre millions de Français et se faufilent au premier rang, dont Netanyahou, bien évidemment. D’autant plus surprenant « qu’en Israël, Charlie Hebdo n’aurait pas même eu le droit d’exister, puisqu’une loi israélienne interdit de représenter Moïse, Jésus ou Mohammed d’une manière qui pourrait heurter les sentiments des croyants » (1). Mais qu’est-ce qu’il foutait là ce monsieur (avec un m très minuscule)?

Faire appel à la peur que semblent éprouver certains Juifs français de vivre en France et leur proposer de s’exiler en Israël ; s’arranger pour faire enterrer en Israël les Juifs assassinés à l’Hyper Casher — comme si on pouvait être en même temps hyper et casher. Bien joué politiquement, il sera sûrement réélu.