mercredi 20 mai 2015

Renifleurs de pétrole, d’explosifs et de vaches suisses

Victor Ginsburgh

Vous vous souvenez sans doute du conte des « avions renifleurs » de pétrole que Valery Giscard dit d’Estaing, ou plus exactement Elf Aquitaine a financés à la fin des années 1970. Inventeur : un belge malin du nom de comte, à ne pas confondre avec conte, de Villegas. Conséquence : une mise perdue de quelque $150 millions—un gros paquet. Bénéficiaire : une société implantée à Panama dont le président était aussi président de la banque suisse UBS, ben voyons, rien de très neuf sous le soleil.

Bref ces avions qui volaient à une hauteur de quelques
Renifleur de pétrole
milliers de mètres d’altitude étaient censés repérer des gisements de pétrole. Si mes souvenirs sont bons, mais qui sait ce que cela veut dire à mon âge, Valéry Giscard dit d’ avait fait un vol dans un de ces avions. Avec le nez qu’il avait (Giscard, pas l’avion), ça n’a pas raté, il a évidemment découvert un gisement, ce qui montre qu’il ne fallait pas investir $150 millions, le nez du président suffisait, mais c’était trop tard, les $150 millions étaient à l’abri dans une banque suisse.


L’appareil de reniflage du comte de Villegas n’a évidemment jamais découvert le moindre gisement. Et pour de bonnes raisons, tout était bidouillé, comme l’a finalement dévoilé publiquement le Canard Enchaîné du 21 décembre 1983. L’opération n’aurait toutefois pas pu se faire sans l’accord de Giscard dit d’ (1), mais l’enquête parlementaire de 644 pages publiée en 1984 « exonère Valery de toute responsabilité ; elle se montre par contre critique envers le premier ministre de l’époque Raymond Barre, qui aurait cherché à étouffer l’affaire (2) ». Qui renifle trop, finit par s’étouffer.

Quelques années plus tard, un zozo anglais du nom de Jim McCormick, a transformé des renifleurs détecteurs de balles de golf achetés à €15 en renifleurs détecteurs d’explosifs vendus à des prix unitaires variant entre €2 000 à € 23 000, suivant les gogos rencontrés : Irak après la chute de Saddam Hussein, les Nations Unies, des aéroports, des hôtels de luxe et la bonne police belge (3). Depuis l’affaire des avions renifleurs, il semble que l’armée française était en état d’alerte, et ne s’est pas fait avoir. Ce qui n’est pas le cas de l’armée suisse.

En effet, début 2015, un nouveau radar militaire utilisé en Suisse prend les vaches qui gambadent dans les beaux alpages pour des avions ennemis (4). L’armée suisse a conclu un contrat de 296 millions de francs suisses (évidemment) avec la société allemande qui fabrique ce subtil radar renifleur. On peut imaginer que c’est la banque UBS qui a financé l’armée en utilisant les €150 millions subtilisés il y a 35 ans à la France.

Comices agricoles
Le compositeur Gioachino Rossini célèbre pour le Ranz des vaches extrait de son opéra Guillaume Tell (5), un héros suisse connu pour la culture de pommes sur la tête et Jacques Chirac, qui s’est rendu célèbre en chatouillant les vaches aux comices agricoles viennent de se mettre d’accord et portent plainte contre l’armée suisse pour molestation de bovins.

(1) Foes blame Giscard for sniffer plane scheme, The New York Times, November 22, 1984.
(3) Fabrice Aubert, L’escroc au faux détecteur d’explosif bernait les Etats et les dictateurs, Le Monde, 3 mai 2013.
(4) Lucie Monat, Les vaches perturbent nos coûteux radars militaires, Tribune de Genève, 13 mars 2015.

1 commentaire:

  1. Mais comment sais-tu tout ça? je renifle à la pensée de la malhonnêteté de nos anciens présidents auprès desquels les récents sont des rigolos. Tu sais que Giscard (dont le père, je crois, a rajouté d'Estaing à son nom) a acheté pour une bouchée de pain le château du village d'Estaing, en Aveyron, dont sa famille n'est pas originaire, et dont les fonds publics de maintient des monuments historiques financent l'entretien!

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