jeudi 27 octobre 2016

Justice et justiciers

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Pierre Pestieau

Cet été, j’ai lu un polar grec (1) qui présentait un tueur lequel s’était mis à cibler les fraudeurs fiscaux. L’effet le plus visible de ces quelque premiers meurtres fut de faire rentrer dans les caisses de l’Etat plus de recettes que le gouvernement grec n’avait réussi à faire en 3 ans en dépit des menaces de la Troïka (2). Le second effet fut de transformer un assassin en héros populaire, version contemporaine de Zorro ou de Robin des Bois. Je ne vous dévoilerai pas la fin qui, rassurez-vous, est hautement morale

Les oubliés d’Hilarante Clinton

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Victor Ginsburgh

Pourquoi hilarante ? Parce que ses conseillers lui ont conseillé de sourire ou de rire lors de ses débats avec Trump (1).  Mais il n’y a pas de quoi sourire ni rire, parce qu’en public, Mme Clinton explique que « notre économie devrait travailler pour chacun de nous, et pas seulement pour ceux qui sont au sommet ». En privé, devant ses banquiers favoris (Goldman Sachs et Black Rock, un fonds de placement qui gère $5.000 milliards), elle explique que nombreux sont ceux qui pensent que la classe ouvrière ne reçoit pas son dû, mais elle ajoute que sa propre opinion n’est pas encore faite à ce sujet. Elle admet qu’elle faisait partie de la classe moyenne, « mais qu’aujourd’hui, suite à la vie que j’ai vécue et à la fortune que mon mari et moi avons accumulée, je suis loin de la classe moyenne ; je n’ai cependant pas oublié que j’en étais » (2). C’est ça l’effet ascenseur tant décrit par les Américains, mais qu’en est-il réellement ?
 
Une étude sur cette question vient d’être publiée (3). Elle porte sur les avantages ou les désavantages que les arrière-grands-parents, les grands-parents et les parents ont transmis à leur descendance. Les avantages et désavantages sont mesurés en termes de niveau d’éducation, mais les auteurs font l’hypothèse que celui-ci est fortement corrélé à la classe sociale, au revenu, et à la richesse. Cette hypothèse est largement acceptée par les chercheurs qui travaillent dans ce domaine.

jeudi 20 octobre 2016

Bernie, Bob et Hillary

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Victor Ginsburgh

Bob Dylan et les Obama
Pour autant qu’il s’en soit aperçu, Donald Trump ne doit pas être très heureux du prix Nobel décerné à un vrai homme de gauche, troubadour lettré et poète de notre temps (1), et qui l’a été sans relâche jusqu’ici. Il n’est d’ailleurs pas exclu que la Fondation Nobel ait fait un pied de nez au monde et aux Etats-Unis en particulier, pour illustrer que la gauche existe encore, même si elle vieillit et que Bob Dylan et Bernie Sanders en sont peut-être le dernier signe.

En tout cas Hillary Clinton n’en est pas un de signe, s’il faut en croire un récent article paru dans Newsweek (2), qui commence par faire référence à un marché dans lequel elle est entrée en 1978. Elle a investi $1.000 dans des « marchés futurs » de viande sur pied, et en est, peu après, sortie avec un petit pactole de $98.541 soit plus de 98 fois sa mise initiale et s’en est vantée dans une conférence faite à la Bourse de NY en 2013. George Soros, le grand spécialiste du marché des matières premières aurait fait à l’époque un gain du 22%. Un doute sérieux plane sur la manière dont elle a réalisé cette performance, mais rien n’a pu être prouvé contre elle (3). Il n’empêche que selon un article paru dans une revue de finance (4), la probabilité qu’elle ait pu faire un tel gain est approximativement de 1 sur 31.000 milliards, autant dire zéro.

lundi 17 octobre 2016

Evasion ou illusion

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Pierre Pestieau

La Grande Évasion (The Great Escape) est un film américain de John Sturges sorti en 1963. Il raconte une histoire vraie qui s’est déroulée 20 ans avant durant la Seconde Guerre Mondiale. Des officiers alliés récidivistes de l'évasion sont prisonniers et surveillés étroitement dans un stalag. Malgré cela, ils préparent une évasion massive. Soixante-quinze d'entre eux parviennent à s'échapper mais la plupart seront rattrapés. Dans son livre éponyme (1), Angus Deaton (2) utilise cette analogie pour conter ce mouvement qui a conduit une partie de l'humanité à s'évader de la misère et de la maladie, ce qui s'est fait au prix d'inégalités aujourd'hui flagrantes entre les pays et les populations. 

Né en Écosse, enseignant à Princeton, Angus Deaton s'est vu décerner le Prix Nobel 2015 pour ses travaux fondés sur la mesure économétrique fine des comportements individuels dans le domaine de la consommation et de la pauvreté en relation avec le bien-être. En 400 pages écrites avec clarté et pédagogie, il  expose à la fois les faits, l’évolution récente des inégalités et de la santé dans le monde, et ses propositions pour réduire ces inégalités ; il nous prévient que la volonté politique est primordiale pour avoir raison des inégalités de revenus et de santé. Il remet en question le mythe d'une relation causale entre croissance du revenu et amélioration de la santé. Pour lui, sauver des vies dans les pays pauvres n’est pas coûteux et il décrit de nombreux cas où la santé s’est améliorée sans qu’il n’y ait eu de croissance. Le ton de l’ouvrage est celui d’un optimisme tempéré.

jeudi 13 octobre 2016

Confiteor

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Retour sur mon blog consacré à l’écologie politique publié il y a 15 jours. J’ai reçu une réaction qui m’a fait réfléchir. On m’y reproche de me gausser des ménages qui se veulent green et qui ne le sont que dans un tout petit secteur de leur consommation, polluant par ailleurs autant que les mécréants. C’est injuste, j’en conviens. Il existe une minorité, faible il est vrai, de ménages qui sont d’authentiques écologistes, c’est-à-dire qu’ils le sont de manière cohérente et constante. Et pour paraphraser l’antisémite canonique, « je compte parmi mes meilleurs amis de tels écologistes ».

J’admets, confiteor (1), je confesse, avoir péché par excès.

Et un lapin sortit du chapeau

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Victor Ginsburgh

 Enfin, nous aurons un nouveau musée bruxellois qui sera installé dans le bâtiment dit Citroën. Bruxellois, si on peut dire. Etant donné que les musées belges n’ont depuis bien longtemps plus les moyens d’acquérir des œuvres d’artistes contemporains internationaux, la collection du Citroën « permettra à ce nouveau pôle culturel de disposer dès ses débuts d’une collection permanente constituée à partir de prêts » … que lui feront le Centre Pompidou. C’est en tout cas ce que dit Serge Lavigne, président dudit Centre P. Et, continue-t-il, « nous conseillerons sur la programmation, le spectacle, la politique pédagogique à destination des enfants et des adolescents et sur toute l’ingénierie muséale, gestion du musée, définition d’une politique d’acquisition, de restauration, etc. » (1). Tant mieux pour nous, mais, que fera Bruxelles dans tout ça ? Embouteiller l’arrivée au musée.

jeudi 6 octobre 2016

Economistes ortho- et hétérodoxes : une nouvelle guerre franco-française

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Victor Ginsburgh

La guerre du Burkini à peine finie (les protagonistes se taisent après avoir constaté qu’il n’y avait plus personne sur les plages parce qu’il faisait plus froid), voilà la guerre des économistes « hétérodoxes » contre les économistes dits « néo-classiques » ou « orthodoxes ».

Le conflit a pour origine un livre de Pierre Cahuc et André Zylberberg, Le Négationnisme Economique, qui, en gros, reproche aux économistes hétérodoxes de ne pas accepter les économistes « néo-classiques » sous le prétexte que ceux-ci utilisent un peu (et parfois trop) de formalisme mathématique ainsi que de l’économétrie. La formulation mathématique a le mérite de rendre leur discours vérifiable : on peut contrôler l’exactitude des preuves ou des calculs et des bases de données s’il s’agit d’économétrie. Cette science, comme l’expliquent Cahuc et Zylberberg « reste certes imparfaite. Mais elle tente de faire le tri entre le vrai et le faux avec des méthodes comparables à celles mises en œuvre par d’autres sciences comme la médecine ou la biologie » (1). L’économétrie a fait des progrès considérables depuis 20 ans et permet en effet de faire des inférences rigoureuses et de tirer des conclusions sérieuses à partir de données observées, mais qui ne sont pas nécessairement expérimentales (c’est-à-dire du type « traitement » d’une part et « placebo » de l’autre, qui sont elles, et pour autant qu’elles soient représentatives de la population, bien plus faciles à interpréter).

mercredi 5 octobre 2016

Les inclassables

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Pierre Pestieau

Le blog qui précède vient de décrire la querelle qui oppose deux camps. A ma droite, les économistes orthodoxes, néoclassiques, orthodoxes ; à ma gauche, les économistes atterrés, hétérodoxes, critiques de l’économie de marché. Cette querelle est ancienne; elle a été récemment attisée par la publication d’un livre brulot qui porte le titre malencontreux de Négationnisme économique (1). Je n’ai pas lu ce livre mais j’ai lu les nombreux articles qui lui ont été consacrés et connais les protagonistes de cette tragicomédie.

La querelle m’intéresse parce que si on s’y laissait enfermer on en arriverait à penser qu’il n’est pas possible d’être un économiste orthodoxe et de gauche à la fois. Or il me semble possible d’utiliser les méthodes et les concepts de l’économie néoclassique tout en reconnaissant les nombreux dysfonctionnements de l’économie de marché et la non- pertinence de l’économie orthodoxe. Par non-pertinence, je veux dire que l’économie orthodoxe s’intéresse peu aux problèmes réels de notre société, le chômage, la précarité et le sous-développement et se dévoie dans des thématiques aussi pertinentes que le sexe des anges. Elle se prétend scientifique et objective là où elle prend parti. L’économie hétérodoxe adopte le plus souvent un style impressionniste mais elle a le mérite de dénoncer un système qui conduit à l’exclusion et à la désespérance.