jeudi 18 mai 2017

Manger ou être mangé

Pierre Pestieau

L’Ile Maurice (1) et le Brésil ont un point commun. L’une et l’autre furent d’abord brièvement colonisés par les Hollandais. Les Hollandais font une courte apparition sur l’île et leur trace la plus visible, si l’on peut dire, est qu’ils contribuèrent à l’extinction du fameux Dodo, cet oiseau qui ne vivait que sur l’Ile Maurice. Du fait de l’absence de prédateurs, le Dodo avait perdu son aptitude au vol car il n’avait pas besoin de se fatiguer pour se nourrir. Il pouvait peser jusqu’à 40 kg et sa chaire était délicieuse. Elle séduisit les navigateurs bataves à tel point qu’après quelques décennies il disparut de la carte à la fin du 17ème siècle. Ceci c’est de l’Histoire.




A peu près à la même époque les marins hollandais qui naviguaient le long des côtes du Brésil devinrent la proie rêvée d’indiens anthropophages qui vivaient le long de la baie de Rio. Ces indiens tendaient des pièges aux navigateurs hollandais qui venaient s’échouer sur des récifs le long de la côte. Ils étaient alors capturés, parqués et engraissés pour être dévorés les jours de fête. C’est ce que relate Ribeiro (2) dans un remarquable roman historique baroque consacré à la naissance du Brésil en tant que peuple et que culture. Bien sûr, ceci c’est une légende.


Mais peu importe la légende, si elle est belle et peut remplacer les faits. Comme le dit le journaliste Maxwell Scott (Carlton Young), dans le fameux western Qui a tué Liberty Valance ? (3): « Ne laissez jamais les faits l’emporter sur une bonne histoire. »

(1)  L’île Maurice, autrefois l’Isle de France, est située dans le sud-ouest de l'océan Indien, à l’est de La Réunion. Elle a une population de 1,2 million et sa superficie représente 6% de celle de la Belgique.
(2) João Ubaldo Ribeiro, Vive le peuple brésilien, Le serpent à Plumes, Paris 1999.

(3) The Man Who Shot Liberty Valance, réalisé par John Ford : « Never let the facts get in the way of a good story. »

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